Christian Vankoekelbergh
Ecriture
Téjat
Le Congrès
Chapitre 2 (1/2)
Illustration Sairaphina-Kro
Je continue donc mes petites investigations, observant chaque échoppe attentivement. Il y a vraiment toutes sortes de produits, et de toutes origines, je ne sais même pas à quoi sert le quart du tiers de ces articles.
De partout j’entends les voix des commerçants monter, ils accostent chaque personne passant devant leur échoppe pour leur demander si ils ont besoin de quelque chose, je me sens un peu agressé, je préférerais qu’on me laisse regarder tout ça en paix.
En tout cas, au vu de leurs tenues, on ne peut pas nier qu’ils viennent d’un peu partout dans le monde.
Soudain, je sens mon genou cogner quelque chose. Je n’ai pas le temps de baisser la tête pour voir ce qui se passe que j’entends une voix un peu énervée :
Le nain : « Dites donc l’échalas, c’est trop compliqué de faire un peu attention ? »
C’est un nain ! Tout petit, avec une barbe pendant jusqu’à son cœur, il est vêtu tout de rouge, un rouge proche de celui de ses joues colorées par la colère, et porte un bonnet à pompon. Très embêté, je me confonds en excuses, lui expliquant que je ne l’ai pas vu. Il me répond avec un mélange de colère et de résignation :
Le nain : « Mouai, c’est quand même bizarre qu’on me sorte à chaque fois cette bête excuse ! »
Je peux bien sûr comprendre son anxiété, être si petit et si peu vu ne dois pas être chose facile. Je le regarde s’éloigner, toujours dans mes pensées, lorsque je tombe sur un commerçant de baguettes magiques et de boules de cristal.
Quelle n’est pas ma surprise, moi qui étais persuadé que ce n’était que des inventions destinées aux livres et aux films, me voilà devant la preuve de l’existence de ces accessoires.
Le commerçant, un vieillard aux yeux cyniques et aux cheveux hirsutes, m’accoste tout de suite, me demandant avec un fort accent anglais si j’ai besoin d’aide ou de renseignements sur les différents articles en vente dans son échoppe.
Tout en me fixant, il se frotte les mains l’une contre l’autre, comme si il était sûr de faire une affaire. Pas de chance pour lui, car même si je me décidais à acheter un de ses articles, je ne vois même pas comment je devrais m’en servir ! Je lui réponds poliment :
Téjat : « Merci mais je ne fais que regarder. »
Le commerçant : « Si monsieur change d’avis, je suis là, et j’y reste ! »
Dans la foule, je repère Caprice et Norbert et leur fais signe. Ils s’approchent de moi et me demandent si j’ai repéré quelque chose d’intéressant.
A ce moment, Caprice remarque l’échoppe où je me suis arrêté et, voyant les baguettes, me dit d’un air solennel :
Caprice : « Je vois que tu as trouvé ta voie, tu sais, tout bon sorcier a une baguette, un jour tu devras t’en procurer une aussi. »
Entendant cela, je demande au commerçant le prix des différentes baguettes.
Le commerçant : « Les baguettes sculptées dans le bois de peuplier sont à vingt euros, et celles en ébène, sont à deux cents euros mais, pour l’occasion, je peux vous faire un prix d’ami… »
Je le remercie pour ses indications et, malgré sa tête déçue d’avoir raté une vente, prends congé de lui. Je profite de la présence de mes compagnons pour leurs demander la différence entre le bois de peuplier et le bois d’ébène. C’est Caprice qui me répond :
Caprice : « Chacun de ces bois apporte une particularité à ta baguette, le bois d’ébène étant plus dur et plus imprégnant, il permet de faciliter l’ensorcellement. De son côté, le bois de peuplier est moins pratique et donne des effets beaucoup moins puissants.»
Un peu plus loin, un commerçant clame, à qui veut bien l’entendre les vertus de ses potions ; il faut l’écouter crier à tue-tête :
Crieur : « Venez voir mes potions magiques, j’ai de tout, vous êtes éperdument amoureux de cette fille qui ne pose même pas le regard sur vous, essayez mes philtres d’amour, ils sont infaillibles. Faites boire un de mes philtres de vérité et vous saurez tout sur ce que pense la personne visée. Des philtres de sommeil pour les insomniaques ? Pas besoin de chercher ailleurs, vous avez tout ce dont vous… »
Arrivé au bout de l’allée, je me sens éreinté, j’ai l’impression d’avoir parcouru de nombreux kilomètres, mais, bien que cette salle soit énorme, ce n’est sûrement pas le cas.
Nous nous dirigeons maintenant vers la galerie de démonstration, je vais enfin pouvoir voir des praticiens à l’œuvre. Et quel spectacle, j’en vois invoquant dieux et déesses sans peur dans la voix, d’autres transformer des humains en animaux, d’autres encore se rendre transparent comme un fantôme et passer à travers tout.
A peine je me remets d’une démonstration qu’une nouvelle me plonge dans un émerveillement intense. En voilà un qui change de visage avec un des badauds, et un autre qui se divise devant mes yeux en deux êtres identiques.
Je me rends compte soudain que dans ma concentration, j’ai perdu de vue Caprice et Norbert. Ce n’est rien, après tout nous ne devons nous retrouver à la buvette que dans une heure. Je décide donc de continuer mon tour. L’espace d’une seconde, il me semble entendre des bruits de sabots mais j’ai beau chercher, je ne vois aucun cheval.
Oubliant ce détail, je continue ma visite sensationnelle ; je suis très impressionné par tous ces pouvoirs, et tellement désemparé, en effet, je suis bien loin d’en posséder suffisamment que pour arriver à de tels résultats, il doit falloir de nombreuses années de pratique pour en arriver là. Il y a ici tellement de choses intéressantes et impressionnantes !
Alors que je me lance dans la troisième allée, un homme m’accoste et me demande :
L’homme : « Bonjour monsieur, comment allez-vous ? Etes-vous satisfait de votre situation ? Ne voulez-vous pas qu’elle s’arrange ? Nous pouvons peut-être voir ensemble ce que nous pourrions faire ? »
En entendant son discours, je comprends directement que c’est un de ces syndicalistes dont m’a parlé Caprice dans la voiture. Je lui réponds catégoriquement que ça ne m’intéresse nullement et m’éloigne.
J’arrive devant une drôle de foule, ce sont plutôt de petits groupes qui ensemble forment une assemblée de personnes, chaque groupe écoutant religieusement un orateur dressé sur un podium. Tout en marchant, j’écoute ce que ces personnes leur disent :
« … et il s’approcha de l’homme et lui dit lève-toi et marche. L’homme malade, à l’aide de sa béquille se leva et jeta sa branche de bois qui lui servait de soutien par terre… »
« …car le prophète Mohammed est le seul à entendre et à nous faire partager la volonté d’Allah… »
« … et il vous jugera comme vous avez jugé les autres, et de là s’abattra sa colère qui descendra du ciel, comme des vagues de flammes… »
Tous ces discours me paraissent déplacés ici, apparemment je me trouve devant les représentants de chaque ordre religieux mais je ne comprends pas leur rapport avec le monde de la magie. Il faudra que je me renseigne auprès de mes amis pour en savoir plus.
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